Économie de plateforme Apprendre d’Amazon
De nos jours, nombreux sont les commerçants qui aspirent à faire fructifier leur boutique en ligne. Pour cela, ils s’ouvrent à de nouveaux partenaires et se transforment ainsi en plateformes ou en places de marché. Mais est-ce suffisant? Quels sont les facteurs de réussite dans l’économie de plateforme?
Économie GAFA: le sigle composé des initiales de Google, Apple, Facebook et Amazon est souvent utilisé pour désigner l’économie de plateforme. En effet, la valeur boursière exceptionnelle de ces entreprises électrise des secteurs entiers. Notamment celui du commerce, qui s’oriente principalement sur Amazon.
Les entreprises susmentionnées ne sont toutefois pas les seuls exemples de plateformes. S’y ajoutent notamment Alibaba en Asie, tout comme le prestataire de paiement Klarna en Europe.
Quel est le principe de l’économie de plateforme?
Sans entrer dans des théories d’économie d’entreprise trop pointues, l’économie de plateforme peut être décrite ainsi: les entreprises devenues plateformes ont abandonné l’idée de proposer leurs propres produits ou services (ou n’y ont jamais aspiré).
Ces entreprises jouent un rôle d’intermédiaire et coordonnent les interactions entre divers partenaires (clients, fournisseurs et même concurrents). L’exemple le plus parlant est sans doute celui de Google dans le domaine de l’édition.
D’une part, il y a les producteurs de médias, qui offrent leurs contenus. De l’autre, il y a les consommateurs, qui souhaitent s’informer par le biais de contenus actuels. Google fait le lien entre les deux (au grand regret des maisons d’édition, mais cela est un autre débat). Cet exemple permet en outre de soulever une autre particularité: Google ne tire aucun profit de cette transaction pure qu’est la fonction de recherche.
Ce qui nous amène à nous demander comment Amazon a pu acquérir une telle puissance, et pourquoi il est si difficile, indépendamment du secteur d’activité, de rivaliser avec une plateforme lorsque celle-ci a atteint une taille critique.
Pourquoi il est difficile de rivaliser avec Amazon
Dans de nombreux articles de presse, Amazon est qualifiée à tort de «géant du commerce». Certes, Amazon est née du commerce de livres. Au tout début d’Amazon en Allemagne, la clientèle a été notamment séduite par la possibilité de recevoir rapidement et simplement à domicile des ouvrages provenant des États-Unis. Et oui: Amazon continue de vendre des marchandises. Néanmoins, le commerce ne représente plus qu’une fraction du chiffre d’affaires de l’entreprise.
Les détaillants classiques achètent des marchandises, y appliquent la marge souhaitée et les revendent en réalisant (idéalement) un bénéfice. La marge leur permet également de couvrir leurs frais de marketing. Amazon a opté pour un modèle différent. Progressivement, l’entreprise a cumulé de plus en plus de services et de sources de revenus venant renflouer son chiffre d’affaires.
La marge de chaque produit ne joue plus de rôle direct, car en fin de compte, les revenus sont répartis sur l’ensemble des consommateurs. Ainsi, les montants qu’Amazon peut potentiellement consacrer au marketing sont tels que la survie des plus petits acteurs du marché se trouve menacée.
- Amazon s’est servie de sa popularité accrue pour permettre aux commerçants de vendre leurs produits pour leur propre compte sur sa plateforme (place de marché). Amazon ne fait donc que participer aux ventes. Aujourd’hui, les commerçants externes contribuent bien plus au volume de marchandises brut (GMV) qu’Amazon elle-même.
- L’entreprise met à disposition des parties déjà exploitées de son infrastructure et utilise les revenus ainsi générés pour élargir encore sa gamme de services. Les commerçants peuvent par exemple faire livrer leurs produits dans les entrepôts d’Amazon et même les faire envoyer directement depuis là («FBA»). Aujourd’hui, l’infrastructure cloud d’Amazon («AWS») est également utilisée par de grandes entreprises – dont certaines sont même en concurrence avec Amazon à d’autres niveaux.
- Pour accroître leur visibilité sur Amazon, les commerçants et les marques peuvent acheter des annonces afin d’attirer l’attention des consommateurs («Amazon Advertising»).
- Et grâce au programme de fidélisation de la clientèle Prime, le groupe bénéficie d’un levier considérable. Les membres Prime peuvent utiliser le service Prime Video. Et en s’abonnant à des «chaînes», les clients et les clientes contribuent encore davantage au chiffre d’affaires.
En fin de compte, tout repose sur l’accès de l’entreprise à sa clientèle. C’est de l’économie de plateforme par excellence. Avec toutes ses offres de service, l’entreprise est si attrayante pour les utilisateurs et les utilisatrices qu’il ne reste que très peu de place pour la concurrence. Si un détaillant classique ayant vendu une veste peut espérer consacrer peut-être 10 francs de sa marge à l’acquisition de clients, la capacité d’investissement d’Amazon est nettement supérieure. Et grâce au développement continu de nouvelles sources de revenu, le montant disponible ne cesse de croître.
La place de marché, un pas vers la plateforme
L’accès aux clients finaux et la monétisation des offres de service sont au cœur du concept de plateforme. Il reste à voir si c’est exactement sur cette stratégie qu’a misé le prestataire de paiement suédois Klarna. En premier lieu, l’entreprise s’est spécialisée dans l’exécution de transactions négligées par les banques. Ensuite, elle a développé ses premiers produits tels que l’achat sur facture pour le client sans aucun risque pour le commerçant – Klarna paie le vendeur, et le client paie Klarna. Enfin, l’entreprise a introduit un service d’achat à crédit. Aujourd’hui, l’application de Klarna dispose même de son propre espace shopping, où les utilisateurs peuvent trouver les offres de commerçants partenaires, mais toujours dans l’environnement de Klarna. L’entreprise a donc bel et bien commencé à s’immiscer entre le détaillant et le client final.
Le succès des plateformes est éclairant et inspirant. Voici trois aspects à prendre en compte:
- Impossible de réussir sans une numérisation systématique des processus et des techniques. Celle-ci sert de base non seulement pour les services proposés, mais aussi pour un redimensionnement de l’ensemble du modèle, c’est-à-dire pour permettre la création de nouvelles ressources sans augmentation exorbitante des frais fixes.
- Le marché évolue. Même Amazon finira un jour par atteindre son point culminant. Cela se produira lorsque ses promesses fondamentales (p. ex. le service) ne se trouveront plus au premier plan. De nouvelles possibilités s’ouvriront peut-être alors pour les commerçants.
- Il n’y a pas de voie royale pour la création d’une plateforme. Chaque entreprise doit déterminer elle-même quelles offres de service et quelles idées sont les mieux adaptées.
Le fait d’ouvrir sa propre boutique à des tiers, autrement dit de créer une place de marché sur son site, peut être un premier pas dans cette direction. Mais il est impératif de poursuivre avec des idées créatives, car comme le montre l’exemple d’Amazon, la place de marché à elle seule ne suffit pas à constituer une plateforme.
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